
Le Quatuor à cordes n°14 en sol majeur, K. 387, dit “Printemps”
Lorsque Mozart compose, à Vienne en 1782, le Quatuor à cordes en sol majeur K. 387, il inaugure une série de six quatuors dédiés à Joseph Haydn, son aîné et modèle. Ce premier volet, surnommé “Printemps”, est souvent décrit comme un miracle d’équilibre : il allie la rigueur du contrepoint et la spontanéité mélodique, comme si la science musicale se dissolvait dans une fraîcheur lumineuse.
Une œuvre à l'affiche du concert du Quatuor Elmire
DétailsUn hommage à Haydn, mais une voix propre
Mozart, alors âgé de vingt-six ans, fréquente les cercles viennois où le quatuor à cordes est devenu un laboratoire d’idées musicales. Haydn a élevé ce genre au rang d’art majeur ; Mozart répond par une série d’œuvres qui témoignent à la fois de son admiration et de son désir d’émancipation. Le K. 387, premier de la série, illustre cette dialectique : structure solide, mais liberté expressive.
Premier mouvement : la science en fête
L’Allegro vivace assai s’ouvre sur un thème généreux, presque symphonique, confié aux quatre instruments en un chœur homogène. Rapidement, Mozart déploie des enchaînements contrapuntiques d’une grande richesse : imitations, dialogues, superpositions. Mais cette science n’est jamais austère. Elle respire comme un jardin au printemps, chaque motif semblant éclore dans la lumière.
Menuet : une danse élégante
Le deuxième mouvement, un Menuetto, impressionne par sa carrure majestueuse. Mozart renoue ici avec l’héritage de la danse, mais l’ornemente d’une polyphonie subtile. Le Trio central, avec ses traits délicats et son écriture imitative, apporte une légèreté qui contraste avec la noble ampleur du cadre.
Andante cantabile : la grâce intime
Dans le troisième mouvement, Mozart nous conduit dans une atmosphère plus intériorisée. La ligne de violon, d’une pureté vocale, chante comme un air sans paroles, soutenue par l’accompagnement feutré des autres cordes. On y retrouve cette “grâce” mozartienne, cet art d’émouvoir sans pathos, où la simplicité mélodique cache une construction harmonique raffinée.
Finale : une apothéose contrapuntique
Le dernier mouvement, Molto allegro, est une véritable démonstration de maîtrise. Fugato, renversements, imitations en cascade : Mozart s’amuse des règles les plus savantes. Mais, fidèle à son génie, il transforme cette virtuosité en jeu lumineux. Le savoir devient danse, et le contrepoint, jaillissement printanier.
Science et grâce, main dans la main
Le surnom “Printemps” n’est pas anodin. Dans ce quatuor, Mozart réussit l’union rare de la science et de la grâce. La rigueur contrapuntique n’éteint jamais l’élan poétique ; la structure rationnelle devient le terreau d’une floraison sonore. C’est peut-être là la leçon la plus profonde de cette œuvre : la musique n’est pas l’opposition du calcul et de l’émotion, mais leur fusion.